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Charles Baudelaire, la première Rock Star

    « Rebel, rebel … »

    On connaît sa poésie qui mérite le détour, mais qui était l’homme ?
    Charles Baudelaire (1821-1867) était anticonformiste, bohème, génial …
    Mais ne serait-il pas en fait une rock star ? La première ?

    Examinons s’il en cochait 4 critères !

    1 – Un Look

    Une Rock Star se reconnaît à son style.
    Les chemises « bûcheron » pour Kurt Cobain, la coupe androgyne de David Bowie, l’uniforme scolaire de Brian Johnson …

    Le look mythique de Charles Baudelaire ? L’habit noir.

    Pendant des siècles, c’était la tenue obligatoire des hommes importants.
    Jusqu’au XIXème siècle, quand ils en ont eu marre !
    Trop passe-partout, associé au deuil
    Et puis sa coupe étriquée est sans intérêt pour les tailleurs …
    Les artistes l’abandonnent et tentent de se différencier à coups d’extravagances : chapeaux pointus, souliers à la poulaine, gilets à la Robespierre …

    Puisque personne n’en veut, Baudelaire s’approprie l’habit noir.
    Il modifie le patron original et ajoute de nombreux plis qui allongent la silhouette.
    Pour éclairer l’ensemble, il porte une chemise impeccablement blanche, une cravate rouge et des gants rose pâle.

    Baudelaire devient le modèle français du dandy.
    Il en adopte même l’attitude narcissique, multipliant les portraits photographiques.
    Les réseaux sociaux de l’époque, en somme !
    Même dans les pires circonstances de sa vie, il soigne son élégance et voue « un culte à sa toilette« , pour être unique jusque dans la parure.

    Du marketing avant l’heure et ça marche !
    On associe encore le génial poète à son habit noir.

    French poet Charles Pierre Baudelaire (1821 – 1867). (Photo by Etienne Carjat/Getty Images)

    2 – Sex, drugs and rock ‘n’ roll !

    Les grands génies ont souvent des failles, ou même des traumatismes qui exacerbent leur penchant artistique et expliquent une vie adulte destroy.

    Charles Baudelaire a perdu son père à l’âge de six ans.
    Il entretient alors une relation fusionnelle avec sa mère, qui se remarie deux ans après avec le général Aupick.
    Charles et lui se détesteront mutuellement toute leur vie.
    À 27 ans, alors qu’il brandit un fusil sur les barricades, en pleine révolution de 1848, Baudelaire crie « Mort au général Aupick » … Ambiance !

    À l’âge de 21 ans, Charles reçoit l’héritage de son père. Une fortune dilapidée en deux ans !
    Jusqu’à sa mort, il est sans le sou et dépend économiquement de sa mère, ses amis et son éditeur.
    Mais aussi des créanciers : pour les fuir il change d’adresse plus de quarante fois !

    Côté coeur, trois femmes ont particulièrement marqué Baudelaire et son oeuvre.

    • La comédienne Marie Aubrun, sans doute rencontrée en 1847.
    • Apollonie Sabatier, appelée « Madame Sabatier » ou « la Présidente ». Une demie-mondaine, maîtresse de Baudelaire de 1857 à 1862.
    • Mais surtout, la dominicaine Jeanne Duval. La Muse, son grand amour tourmenté, faite de nombreuses ruptures et réconciliations. Baudelaire et elle souffrent de la syphilis et de l’addiction au laudanum (ou « vin d’opium »).
      Sa Courtney Love, en somme !

    Et puis une fin de vie pas très glamour.
    Il meurt, ruiné, sous tutelle et paralysé, le 31 août 1867, à 46 ans, dans les bras de sa mère.
    Seulement 20 personnes assistent à ses funérailles.
    Ironie du sort : le notaire, qui gérait ses comptes, aurait pu régler ses dettes et lui permettre de vivre confortablement.

    Un destin qu’ont connu d’autres artistes (Bob Hite de Canned Heat, Michael Jackson, Elvis Presley …)

    3 – Porte-parole de la jeunesse

    Le parfait rebelle comprend son époque mais se met les autorités à dos.
    C’est pour ça que le public l’adore : il dit tout haut ce que la jeunesse pense tout bas.

    baudelaire

    Baudelaire aborde des thèmes qui ne peuvent pas plaire aux notables de son époque : sexe, mort, drogue et désespoir.

    Son chef-d’oeuvre Les Fleurs du Mal, publié en 1857, scandalise et Baudelaire est accusé d’« outrage à la morale publique » et d’« offense à la morale religieuse ».
    Il faut dire que certains poèmes frisent la pornographie. C’est pourquoi les soutiens sont rares … Mais ils existent !
    Alors que Théophile Gautier, à qui le recueil est dédié, ne se prononce pas, Victor Hugo est admiratif et pense que l’ouvrage apporte « un frisson nouveau ».

    4 – La légende

    Le procès coûte à Baudelaire 50 francs d’amende et la censure de six poèmes.
    Mais Les Fleurs du Mal reste, un siècle et demi après, une oeuvre majeure de la littérature.

    La poésie de Baudelaire rompt avec le classicisme de son époque, dans les thèmes mais aussi dans sa métrique.
    Résolument moderne, ses vers ont influencé des pointures du XXème siècle, comme Léo Ferré et Serge Gainsbourg.

    D’ailleurs, si le mot « modernité » a été inventé par Balzac, son concept a été définie en premier par Baudelaire.
    On lui doit aussi l’utilisation en français du mot anglais « spleen » comme synonyme de « mélancolie ».
    Et le premier vers de « Spleen » est entré dans le langage courant : « J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans ».

    Et finalement, au-delà de la posture, du costume ou de la biographie, c’est bien à cette postérité que l’on reconnaît les vrais Rock Stars, non ?

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