Entre respect et crêpage de brushing !

En 1979, pour la première fois, l’Angleterre a deux femmes à sa tête.
La très conservatrice Margaret Thatcher (1925-2013), tout juste nommée chef de gouvernement du Royaume-Uni.
La reine Élisabeth II (1926 – …), qui, depuis son couronnement en 1952, a déjà connu pas mal de premiers ministres !
Elles avaient presque le même âge, se sont côtoyées pendant onze ans, mais la rumeur les disait ennemies.
Décryptage.
Les crimes de lèse-majesté !
Premières impressions
S’il y a une chose que respecte la Reine d’Angleterre, c’est bien le protocole.
Alors, pour ne pas faire tâche devant Sa Majesté, il faut parfaitement maîtriser une longue liste d’obligations.
Comme la révérence ou l’art de la « conversation de dîner » (d’abord parler à l’invité situé à sa droite), pour n’en citer que deux.
Facile pour Élisabeth II, qui a depuis toujours baigné dans ce milieu strict et codifié.
Mais il en est autrement pour Margaret Thatcher, 54 ans, fille d’épicier et d’une couturière.
Certes, la Première Ministre s’est depuis longtemps élevée dans la société, devenant une brillante avocate puis la chef du Parti Conservateur.
Elle n’a pas naturellement les manières qui plaisent à Sa Majesté.
Margaret est « trop » ou « pas assez » !
Ainsi, dès sa première audience hebdomadaire de rigueur (chaque mercredi à 18h30), la Première Ministre parle, parle, parle …
Élisabeth II n’a jamais l’occasion d’évoquer son avis sur l’ordre du jour, et d’ailleurs Margaret Thatcher ne lui demande pas !
Et ne parlons pas de cette manie de s’asseoir en bout de fauteuil qui insupporte la Reine.
Tant pis pour elle ! Margaret ne se démonte pas.
Ce n’est pas le genre de celle que l’on a surnommée « la dame de fer » dès 1976.

« Sa révérence descend jusqu’en Australie » – Élisabeth II
Ça chauffe !
La Reine n’a pas le droit constitutionnel d’appuyer un bord politique.
Cependant, pendant les années Iron Lady, ses idées ne penchent clairement pas vers le parti conservateur.
Margaret Thatcher est trop inflexible à son goût, notamment pendant la Guerre des Malouines ou la grève des mineurs.
Leurs désaccords deviennent publics quand en 1986, le Sunday Times en fait sa une.
Le journal raconte comment Élisabeth II pourrait s’attaquer à la locataire du 10 Downing Street, sortant de son devoir de réserve.
Une info aussitôt démentie par Buckingham Palace, qui blessa pourtant Margaret Thatcher.
Autre exemple d’exaspération de la Reine : lors d’un barbecue traditionnellement organisé en Écosse par Élisabeth et le prince Philippe.
Un événement inhabituel pour Margaret qui, voyant l’ambiance plus décontractée qu’au palais, essaie d’aider à table. La Reine s’écrie alors : « Est-ce que quelqu’un va dire à cette femme de s’asseoir ! ».
Par contre, on ne sait pas ce qu’Élisabeth II a dit, quand, après l’avoir vue faire la vaisselle, Margaret Thatcher lui offre des gants en caoutchouc !
Et puis Élisabeth II s’est habituée à Margaret Thatcher !
Il faut croire que grâce au temps, on se fait à tout !
Et puis, les deux femmes se ressemblent malgré tout.
Élisabeth II, dont la raison d’être est le sens du devoir, apprécie l’engagement passionné de sa Première Ministre pour leur pays.
En privé, elles évoquent même quelques fois leur rôle de mère.
Alors qu’elle devait avaler un verre de whisky pour se calmer avant chaque audience du mercredi, Margaret Thatcher finit par aimer échanger avec la femme d’expérience qu’est la Souveraine.
Alors, en 1991, quand le Parti conservateur contraint la Première Ministre à démissionner, Élisabeth II ne cache pas son regret.
Elle lui accorde l’année suivante le titre de baronne et la décore de l’Ordre de la Jarretière, la plus haute distinction britannique.
Quand Margaret Thatcher décède le 8 avril 2013, la Reine assiste même à ses funérailles.
Un honneur et une marque de profond respect qu’elle n’avait accordés à aucun de ses prédécesseurs, à part Winston Churchill en 1965.

Sources
Télé 7 Jeux
Vanity Fair
Lire L’Histoire de l’Angleterre
