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Michel Sardou : ses 15 chansons qui ont fait polémique

    Réac’, engagé ou juste acteur ?

    michel sardou

    « Je ne suis pas l’homme de mes chansons. »
    C’est ce que Michel Sardou chante dans son ode au public, « Salut » (1997).
    Pour lui, ses chansons sont des histoires qu’il joue sur scène et qui ne reflètent pas forcément ses propres opinions.
    Pourtant, le public a souvent eu du mal à discerner l’homme de l’artiste …

    « Les Ricains » (1967)

    La polémique

    À cause du timing !
    Elle sort en pleine guerre du Vietnam, conflit qui ne rend pas populaire les États-Unis.
    D’ailleurs, De Gaulle a même fait sortir la France de l’OTAN.
    Il fait interdire « Les Ricains » en radio … Une censure qui sert pourtant Michel Sardou, puisqu’elle lance sa carrière, à tout juste 20 ans !

    L’intention

    Les paroles de Michel Sardou sont un hommage aux soldats américains venus se battre (et mourir) en France pendant la Seconde Guerre mondiale.
    En particulier lors du débarquement sur les plages de Normandie le 6 juin 1944.

    Il explique dans une interview de 2000 :

    « Dans les « Ricains » par exemple, j’ai réagi contre un anti-américanisme assez primaire sévissant à la fin des années 60, qui me choquait compte tenu de ce qu’on leur devait. »

    Anecdote : Michel Sardou destinait « Les Ricains » à Alain Delon, croisé sur le tournage de Paris brûle-t-il ? (1966, René Clément).

    « Le Rire du Sergent » (1971)

    La polémique

    Avec le temps, la chanson est qualifiée d’homophobe.
    Ses paroles semblent se moquer d’un sergent homosexuel qui aurait « couché utile » pour obtenir son grade.

    L’intention

    Michel Sardou la raconte dans son autobiographie Et qu’on n’en parle plus (2009), quand il évoque son service militaire :

    « Au moment de déclarer ma profession, j’annonçai « artiste » et, comme partout, lorsqu’on est artiste et un artiste inconnu, on fait forcément un métier de pédé. (…) Vous savez maintenant que « Le Rire du sergent » n’était ni une attaque, ni une revanche. 
    Le « pédé », c’était moi. »

    « Le curé » (1973)

    La polémique

    L’interprète se met dans la peau d’un curé de campagne, qui vit très mal le célibat.
    L’Église ne tarde pas à râler et menace même Sardou d’excommunication.

    L’intention

    Comme dans la plupart de ses chansons, Michel Sardou dit « je ».
    Alors évidemment, il n’est pas le curé de son texte mais il semblerait que cette fois, il soit assez d’accord avec l’idée qu’il décrit.

    « Les Vieux Mariés » (1973)

    michel sardou

    La polémique

    Le premier affrontement avec les féministes !
    Le chanteur est accusé de sexisme à cause des vers :
    « Tu m’as donné de beaux enfants,
    tu as le droit de te reposer maintenant. »

    L’intention

    Le coauteur de la chanson, Pierre Delanoë, a expliqué qu’il s’agissait d’une réponse à la chanson « Les Vieux » de Jacques Brel.
    Alors que le Belge évoque une vieillesse tragique, Michel Sardou a voulu montrer (peut-être maladroitement) un couple de longue date qui s’aime encore et repart en lune de miel.

    « Les villes de solitude » (1974)

    La polémique

    La chanson décrit les pulsions extrêmes d’un homme que l’alcool désinhibe.
    Certains couplets font penser à certains que Michel Sardou cautionne le viol et la brutalité !
    Le Mouvement de libération des femmes organisent alors des manifestations devant ses salles de concert.

    L’intention

    Dans une interview, Sardou s’est expliqué ainsi :

    « Je n’ai jamais dit que j’étais pour le viol dans « Les villes de solitude ».
    J’y jouais le rôle d’un personnage qui était un peu à l' »Orange mécanique », ce n’était pas moi.
    Le type disait ça dans sa tête, il ne disait pas qu’il allait le faire. »

    « Le France » (1975)

    La polémique

    Une chanson politique qui ne plaît pas à la droite, alors même que Michel Sardou est critiqué pour être de ce bord.
    Ici, l’interprète « parle » à la place du paquebot, le France, que le président Giscard d’Eistaing a décidé de désarmer, car peu rentable.
    L’équipage, appuyé par le PCF et la CGT, s’était alors mis en grève pour protester contre cette décision.

    L’intention

    Elle était bien de « pleurer » cette création française, concurrencée par le Queen Mary.

    « Je suis pour » (1976)

    La polémique

    Une des plus importantes de toute sa carrière.
    La chanson, qui évoque la haine d’un père envers l’assassin de son fils, est interprétée comme une apologie de la peine de mort.
    Elle fait d’autant plus débat que l’affaire Patrick Henry bat son plein : l’homme était accusé de l’enlèvement et du meurtre d’un enfant de 7 ans.

    L’intention

    Michel Sardou s’est toujours défendu de militer pour la peine capitale.
    Il a expliqué avoir voulu parler des instincts paternels et de la Loi du Talion.

    « Mon énorme maladresse a été le titre de ma chanson « Je suis pour ».
    Il ne reflète pas le texte, qui parle de la loi du talion.
    Si je l’avais intitulée « Talion », il n’y aurait pas eu de scandale. »
    interview de 2012

    « Ce n’était pas une provocation mais un mauvais choix de titre à l’époque du débat sur la peine de mort.
    Ce titre voulait dire que j’étais pour la peine de mort, ce qui n’est pas tout à fait vrai.
    C’est fait et je ne regrette rien. »
    interview de 2000

    « J’accuse » (1976)

    La polémique

    Elle vient des paroles très acerbes, dans lesquelles Michel Sardou dénonce la pollution, les génocides, bref le manque d’humanité des hommes.

    L’intention

    Forcément, le chanteur s’est inspiré du célèbre article d’Émile Zola pour faire un pamphlet musical.
    C’est l’un des seuls textes qu’il n’a pas assumé sur la longueur.
    Il a remplacé les deux vers homophobes : « J’accuse les hommes de croire des hypocrites / Moitié pédés moitié hermaphrodites ».

    « Le temps des colonies » (1976)

    La polémique

    Un autre morceau inclus dans le disque La Vieille (1976) (comme « Le France », « Je suis pour » et « Le temps des colonies ») …
    4 scandales pour un seul opus …
    Normal que des comités anti-Sardou soient nés à cette époque !
    Dans « Le Temps des colonies », Sardou incarne un ancien colon nostalgique, raciste

    L’intention

    … mais caricatural !

    « Je jouais juste le rôle d’un mec à la Audiard, qui balance sa nostalgie du bon vieux temps.
    Mais je savais que ce texte allait provoquer, et ça m’amusait. »
    Interview de 2012 au JDD

    « Vladimir Ilitch » (1983)

    Michel Sardou

    La polémique

    Un classique de Sardou, qui n’a pas forcément plu à sa sortie, en raison de son ambiguïté.
    À la fois son constat pessimiste du communisme et l’évocation de Lénine comme figure christique.

    L’intention

    « Pour « Vladimir Ilitch », tout est parti d’une discussion à table.
    Bourtayre nous dit : « J’ai vu un documentaire à la télévision sur la répression du printemps de Prague, des mecs avaient écrit sur un mur « Lénine réveille-toi ! Ils sont devenus fous ! » ».

    Avec Delanoë, on décide aussitôt d’en faire une chanson. Pierre était gaulliste, réac’ absolu, fort en gueule, brut de décoffrage – mais charmant au demeurant.
    Il va dans sa chambre, moi dans la mienne.

    Je commence mon texte par « Un vent de Sibérie souffle sur la Bohême / Les femmes sont en colère aux portes des moulins. »
    Delanoë en rajoute sur le côté anticommuniste primaire, moi, je voyais quelque chose de plus romantique, genre Docteur Jivago. »

    « Les Deux Écoles » (1984)

    Michel Sardou

    La polémique

    Une chanson qui s’inscrit dans la politique de l’époque : elle paraît quand le projet de loi Savary fait descendre les Français dans la rue.
    Le ministre de l’Éducation nationale voulait unifier les établissements privés et publics.
    (Finalement, Mitterrand retira le projet après la manifestation du 24 juin 1984, qui réunit 2 millions d’opposants.)

    L’intention

    Le débat fait rage et Sardou se mouille : que chaque parent décide l’éducation de son enfant.
    Lui-même a étudié dans les « deux écoles … et ça n’a rien changé ».

    « Le Bac G » (1992)

    La polémique

    Une autre chanson qui n’a pas plu au ministre de l’Éducation, mais cette fois, c’était Lionel Jospin !
    Après avoir écouté cette critique du système scolaire français, il déclara refuser de discuter avec « un saltimbanque ».
    Michel Sardou se mit également à dos plusieurs proviseurs et enseignants !

    L’intention

    Les paroles sont inspirées d’un éditorial paru dans Le Figaro Magazine.
    Le journaliste décrivait son regret de ne pas avoir répondu au courrier d’un jeune qui se demandait « Faut-il désespérer ? ».
    Quant au Bac G, qui est une filière technologique que tout le monde a défendu, en fait, Sardou pensait qu’il s’agissait du bac général !

    « Selon que vous serez … » (1994)

    La polémique

    Des magistrats célèbres, comme le Premier Président Honoraire de la Cour de Cassation, s’insurgent contre cette chanson.
    Ils jugent (!) qu’elle critique le système judiciaire et laisse entendre que la justice est aux mains des puissants.

    L’intention

    Son titre reprend la morale d’une fable de La Fontaine, « Les Animaux malades de la Peste » :
    « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »
    Michel Sardou a toujours dit que son texte ne reflétait pas son opinion personnelle.

    « Allons danser » (2007)

    La polémique

    La perception de la chanson a été influencée par certains commentaires de Michel Sardou dans la presse.
    À la veille des élections présidentielles, on reproche au chanteur d’utiliser un single pour promouvoir, ni vu, ni connu, le programme de son ami, Nicolas Sarkozy.

    L’intention

    Michel Sardou s’en défend, puisqu’il a écrit les paroles « il y a un an et demi sans Sarkozy pour [lui] tenir la plume ».

    « Être une femme » (2010)

    La polémique

    Michel Sardou revisite son tube de 1981.
    Il en change les paroles … et aurait dû s’abstenir !
    La nouvelle version de la femme, qui passe du simple objet sexuel au être « des hommes à temps plein » peu impliquées dans la vie amoureuse, ne plaît pas du tout au MLF.

    L’intention

    Pour se défendre, Michel Sardou a déclaré :

    « Même quand je ne le veux pas, on trouve toujours qu’il y a de la polémique dans mes chansons mais ça ne fait rien. Ça fait partie de l’image qu’on a… »

    Mais excédé, il revient sur la polémique qui le suit depuis la version originale de la chanson :

    « Les féministes n’ont rien compris, elles n’ont rien dans la tête.
    J’ai été flagellé, crucifié, alors qu’il n’y avait rien d’antiféministe !

    Et aujourd’hui elles font toutes ces métiers.
    Encore aujourd’hui, je suis un dangereux machiste !
    Dans « Etre une femme », tout ce que je disais, elles le font aujourd’hui. Pilote d’avion, chauffeur de bus…
    Elles font des métiers de mecs ! Est-ce dégradant ?
    Pourtant, de nombreuses associations féministes m’ont bastonné. »

    Finalement, même s’il dit être l’interprète de personnages fictifs, pour beaucoup, Michel Sardou restera le réac’ de service …
    Et il en joue !

    12 commentaires sur “Michel Sardou : ses 15 chansons qui ont fait polémique”

    1. TOIA-HURET Battistina

      Seul Michel Sardou traduit les sentiments des Français et ose les chanter. Je suis d’accord à 100% avec ses textes, de lui ou pas, qui dénoncent l’hypocrisie, la cupidité et la bêtise humaine, surtout celles des politiciens qui croient tout savoir et qui ne pensent qu’à leurs propres intérêts au détriment des populations qu’ils sont censés servir. Ce ne sont que des parasites payés grassement par les contribuables qu’ils « essorent » de tous côtés. Bravo Michel Sardou!

    2. Concernant le bac G, apparemment c’est une légende de dire que Sardou pensait au Bac G pour général. En effet à la lecture de l’excellent volume 2 de l’encyclopédie des chansons de Sardou par Bertrand Penisson, il semblerait que Sardou savait que le bac G était un bac technologique (compta) puisqu’il serait à l’origine des changements de noms de filière effectués quelques mois plus tard… (G passant en STG). Pour ma part, je reste persuadé que Sardou connaissait la signification du G car c’est une personne qui ne reste jamais déconnecté de la société (la preuve avec cet article … qui résume bien le tout) Bravo

      1. De mémoire, je crois bien que Sardou avait évoqué dans une interview (ou dans sa première autobiographie) le fait qu’il avait confondu le bac général et le bac technologique.
        Après, les fans de Sardou, nous savons bien qu’il a tendance à modifier ses propos d’une interview à l’autre, car il s’en fiche !
        Dans tous les cas, le bac en lui-même n’était pas le point important, mais un prétexte pour évoquer la vraie lettre d’un jeune étudiant désabusé.
        Surtout, merci de votre commentaire et de votre lecture (et je vais tenter de retrouver ma source 😉

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